LA VIS et LA LERGUE reliées par les eaux souterraines !
L’aven du Cochon est un « agent double ! »
C’est un nouveau rebondissement dans l’enquête sur l’aven du Cochon qui vient de se dérouler en ce début d’année 2023. Cette cavité fait à nouveau parler d’elle et nous amène sur une particularité géologique sans précédent sous le Larzac Méridional. Une leçon d’hydrogéologie qui fini d’enterrer tous les sceptiques et les mauvaises langues ! L’enquête continue et la vision du territoire change…
Souvenez-vous, en mars 2022 nous dévoilions les résultats inédits du traçage des eaux (lire notre article « l’aven du Cochon est une cavité Viscieuse ») de cette « classique » située à St Pierre de la Fage et qui ne suscite guère d’intérêts de la part de la communauté spéléologique, à part pour son emplacement idéal en matière d’entrainement secours. Il est vrai que le coté boueux de l’affaire et peu glamour, repousse le spéléologue de salon qui hésite fortement à se salir les bottes préférant ainsi d’autres horizons. Mal connue et pourtant positionnée stratégiquement, elle est explorée pour partie dans les années 50 et 80 mais s’avère être une cavité « Viscieuse » et bien plus complexe qu’il n’y paraît !
Les colorants alimentaires injectés en mars 2022 (sulforhodamine B et fluorescéine) dans le cadre de l’Observatoire du Karst et en partenariat avec le service hydrogéologie du CD34, avaient fini leurs courses à l’émergence de Gourneyras, dans la vallée de la Vis, mettant ainsi à mal (temporairement !) les résultats de la coloration de 1966. Réalisée par le regretté et éminent Henri Paloc, ce traçage « historique » prouvait la connexion avec le cirque de Gourgas (St Etienne de Gourgas) et le réseau de la grotte du Banquier situé à l’opposé de la source de Gourneyras . Des résultats bien trop différents qui allaient pousser notre enquête encore plus loin…
Nous ne sommes pas de nature à baisser les bras mais plutôt à essayer de se rapprocher d’une certaine vérité, quitte à balayer toutes les certitudes. Nous avions promis de revenir pour comprendre et éclaircir le mystère !!! L’eau est une richesse qui ne peut pas attendre ! Nous avons donc recommencé l’expérience dans les mêmes conditions et au même endroit qu’en 1966. Le 4 décembre dernier, 7 kg de fluorescéine ont été injecté dans le puits Gravagne à la profondeur de – 122 m, à l’endroit même où la première expérience avait eu lieu 57 ans plus tôt.
La géologie est un art complexe et l’hydrogéologie encore plus ! Les résultats du laboratoire viennent de tomber et confirment de façon irréfutable que « l’aven du Cochon est un agent double !«
Outre le fait que le colorant fasse à nouveau son apparition à Gourneyras (St Maurice-Navacelles) en parcourant (en un temps record de 15 jours) les 10.5km de distance, il résurge également aux sources de l’Avocat, de la Bergère et de la Bronzinadouïre situées sur la commune de St Étienne de Gourgas (4.5km). Une diagonale Sud/Ouest-Nord/Est de 14.5 km qui relie un des affluents de la Lergue (La Brèze) à la vallée de la Vis par les eaux souterraines. Paloc avait donc raison…et nous on se gratte la tête encore plus !
A quoi ça sert concrètement ?
Ce n’est pas à nous de faire des propositions en matière de gestion territoriale, nous ne sommes que des observateurs du monde souterrain. Ce qui est certain, c’est que le changement de vision en matière de gestion de l’eau et d’aménagement possède là une preuve irréfutable que le milieu souterrain y joue un rôle majeur ! Les traçages servent à cela. Ils servent à comprendre comment ça marche ! Les rivières ou les sources que nous connaissons ne sont pas uniquement une partie visible et aérienne mais bien un système complexe, fragile et méconnu qui mérite qu’on s’y attarde afin de préserver, comprendre et protéger la ressource.
La vallée de la Vis et celle de la Lergue ont un point d’entrée commun par l’aven du Cochon qui laisse présager un immense réseau inconnu dont la source de Gourneyras et la grotte du Banquier sont les exutoires. L’avenir dira si cet « agent double » nous laisse explorer un peu plus ses recoins pour venir apporter quelques réponses supplémentaires aux interrogations qui nous animent… Résoudre peut être l’énigme de ce double réseau potentiel !
C’est à cela que sert le travail de Larzac Explo et de Céladon. Au travers de cette formidable dynamique, il permet quelques avancées inédites sous ce grand plateau calcaire qui ne finit pas de nous surprendre et qui dévoile encore quelques secrets malgré le travail mené par les spéléologues d’investigation depuis plus de 130 ans. Nous apportons modestement notre contribution avec l’aide des services de la Communauté de Communes Lodévois et Larzac et du CD 34 afin de permettre aux aménagistes territoriaux de demain de mettre l’eau et le monde souterrain au cœur des débats.
3 réflexions sur « LA VIS et LA LERGUE reliées par les eaux souterraines ! »
Hommage à Henri Paloc en son temps d’avoir mis en évidence ce traçage, et à Larzac Explo-Céladon de confirmer et de montrer la complexité de ces réseau du Sud Larzac, relié par un partage des eaux me faisant penser à Tartabizac sur la Can de L’Hospitalet.
Je crois que d’autre colorations avait emmenées une ébauche de votre théorie. Regardez les résultats de traçages sur le Causse Méjean avec la Source des Ardennes. Si jamais elle se confirme, sur d’autre karst (Vercors, Jura, Quercy) ce qui pourrait être le cas, je pense que votre découverte pourra être comparable à celle de Wegener (tectonique des plaques) pour la géologie ou Flemming pour les antibiotiques : une découverte qui réduira à néant le passé de l’hydrogéologie pour voir d’un œil nouveau les cours d’eau souterrains.