Traçages du sud Larzac : un premier bilan positif
L’heure est actuellement au bilan concernant le multi-traçages réalisé le 19 mars 2021 dans l’aven des Perles et dans l’aven des Deux Zèbres. Des résultats plus que positifs comme nous l’explique Nicolas Liénart chef du service hydrogéologie du département de l’Hérault, partenaire de l’opération :
« Le vendredi 19 mars 2021, une équipe pluridisciplinaire a injecté deux colorants dans deux cavités sur le plateau du Larzac au-dessus de Pégairolles de l’Escalette (voir notre article du 2 avril 2021). Sur place des spéléologues, des pompiers du SDIS34, des techniciens du SIELL (Service Intercommunal des Eaux de Lodève) et du Conseil départemental, des élus, des passionnés de l’eau et des journalistes ont vu partir sous terre de l’eau chargée en colorant alimentaire dans l’aven des Deux Zèbres (coloré avec de la fluorescéine – de teinte verte) et dans l’aven des Perles (coloré avec de la sulforhodamine B – de teinte rouge).
Depuis ce jour, des appareils de mesure précis (fluorimètres) ont cherché à détecter la présence de ces colorants dans les eaux des principales sources du secteur. Des bénévoles ont également œuvré en prélevant régulièrement des échantillons afin de valider les résultats par une analyse en laboratoire.
Plus de deux mois après de début de cette aventure, l’heure est venue de parler un peu des résultats !
En 36 heures environ, le colorant de l’aven des Perles est ressorti aux sources des Coutelles, dont une partie est captée pour l’eau potable de Soubès. Pas d’inquiétudes, l’eau est restée transparente pour les habitants mais la sulforhodamine n’est pas passée inaperçue pour les appareils ! Cette expérience en hautes eaux confirme et viennent compléter les travaux de 2013 lors d’un traçage en condition d’étiage. Par contre, ces résultats contredisent les travaux plus anciens de 1969 qui annonçaient 333 heures de temps de trajet en crue. Ce sont les mystères des écoulements souterrains !
La courbe rouge du graphique ci-dessous illustre la restitution du colorant pendant 40 jours de surveillance. Quelques explications :
- Le colorant apparait assez rapidement pour atteindre un pic de concentration. Il disparait ensuite peu à peu, au fur et à mesure des écoulements dans le réservoir calcaire naturel.
- Les pics rouges sont des aberrations de mesure liées au fonctionnement du captage.
- Les zones grisées doivent être ignorées car elles traduisent des dysfonctionnements ou des saturations de l’appareil.
Mais où est passée la fluorescéine de l’aven de Deux Zèbres ?
Voilà une question que l’on s’est posée à maintes reprises. On n’y croyait plus !
Mais le mercredi 14 avril, la fluorescéine faisait son apparition à la source de Ladoux et visible à l’œil nu ! C’est tout naturellement et avec satisfaction de ce résultat que M. Frédéric Roig, maire de Pégairolles, nous a contacté pour lever enfin le mystère et l’attente interminable. L’eau est ensuite restée de couleur verte durant une bonne vingtaine de jour… quand même !
En réalité, le colorant a commencé à apparaître le dimanche 11 avril vers 18h, mais il n’était pas visible à l’œil nu. Il aura mis 23 jours pour parcourir une distance de presque 3 kilomètres et un dénivelé de 280 m. Ainsi, sa vitesse de circulation est d’environ 130 mètres par jour, soit 5,4 mètres par heure… ce qui est très faible ! Il ne faut pas oublier que le colorant a dû descendre (280m de verticale) pour rejoindre la partie dite « noyée » du karst, avant d’entamer un trajet quasi-horizontal en direction de Ladoux… ce dernier tronçon a certainement été parcouru plus rapidement.
La courbe de restitution de la fluorescéine ci-dessous est très classique. Dès l’apparition du colorant, la concentration monte rapidement pour atteindre son pic maximal, puis le colorant disparait ensuite assez rapidement. La crue du 11 mai chasse définitivement les traces restantes de colorant dans le milieu souterrain.
Durant l’opération, nous avons également surveillé les sources de l’Avocat et la source de la Bronzinadouïre situées sur la commune de St Étienne de Gourgas.
- Les sources de l’Avocat n’ont présenté aucune trace de colorant durant toute la période de suivi. Elles sont à exclure de la zone d’alimentation.
- La source de la Bronzinadouïre a présenté quelques traces de sulforhodamine, mais cet élément doit être confirmé par le laboratoire qui est en train d’analyser des échantillons d’eau avec des appareils encore plus précis.
Que signifient concrètement ces résultats ?
Ces expériences permettent de démontrer la liaison physique des écoulements souterrains entre un point d’entrée dans le sous-sol calcaire (un aven, une grotte…) et un point de sortie (souvent, une source). Le fait de ne pas revoir un colorant à une source et de le trouver à une autre nous permet de déterminer une limite du bassin hydrogéologique de la source colorée.
Ainsi, le bassin hydrogéologique de la source de Ladoux s’étend au moins jusqu’à l’aven de Deux Zèbres. Par contre, il n’atteint pas la zone de l’aven des Perles. »
Ces traçages réalisés simultanément dans les deux cavités apportent un regard nouveau sur le fonctionnement du karst de ce secteur au vu de certains résultats inédits. Ils s’inscrivent dans un programme de partenariat entre les collectivités territoriales (Com Com, CD34, communes…) et Larzac Explo-Céladon qui s’étalera jusqu’en 2023. A terme, ces études permettrons la mise en lumière des différentes relations entre certaines cavités majeures du plateau et les sources de la vallée. Tout ce travail dans un but spéléologique mais surtout et avant tout dans l’intérêt de la connaissance et la protection de la ressource en eau potable.
Les associations Larzac Explo et Céladon dédient ces résultats à Bruno Mialane
One thought on “Traçages du sud Larzac : un premier bilan positif”
Pourrais je avoir ce document en PDF sur ma messagerie.
danielcaumont@yahoo.fr
Merci