Abîmes du Mas de Rouquet : Sur les traçes de Gabrielle et Joseph Vallot…
Des premières photographies souterraines à l’aire numérique…
L’aven du Mas de Rouquet situé proche de la ferme du même nom est une cavité majeure de l’histoire de la spéléologie caussenarde. Occupée dès le néolithique, elle fût également une cave à fromage au début du 19ème siècle et le théâtre des premières explorations du célèbre couple Vallot le 7 juin 1889… aux prémices de notre discipline…
On connait Joseph Vallot pour ses travaux sur le Mont Blanc et la création du refuge portant son nom à 4362 m d’altitude… On a souvent reconnu ce grand érudit, né à Lodève en 1854, pour ces travaux sur la botanique et sur la glaciologie. La ville lui a rendu hommage en donnant son nom au lycée public et son domaine familial est aujourd’hui une clinique réputée, entourée d’un magnifique arboretum.
Cependant, on oublie souvent Gabrielle Vallot (née Pérou), sa fidèle compagne, qui se lança avec lui dans l’aventure montagnarde devenant ainsi un maillon essentiel à la réussite de son illustre mari… Lui , le scientifique, elle, la plume…
Ce que l’on sait moins en revanche, c’est que les Vallot étaient intimes d’E.A.Martel, père fondateur de la spéléologie. C’est ainsi, pense t’on, que le couple se lança dans l’exploration du monde souterrain de la région de Lodève. Martel ayant dit à Vallot lors de son passage à « St Martin » (actuelle clinique du souffle) en juin 1889 : « Tu devrais, avec Gabrielle, prospecter, et qui sait ! découvrir un autre Dargilan ! … «
Sur ces paroles, arnachés de cordes, d’échelles et aidés du fidèle Randon (élagueur à Lodève), le couple découvrit les cavernes du Lodévois. La grotte de Labeil, la grotte de Gériols, la grotte Vitalis et l’emblématique Abime du Mas de Rouquet avec son obélisque de 12m !!!
Notre travail de recherche dans ce secteur nous amène naturellement sur les traces de ces précurseurs… Gabrielle fut une des premières femmes françaises à écrire sur les cavernes dans l’annuaire du Club Alpin Français de 1889. Elle fait office de pionnière en la matière dans une société de la fin du XIX ème siècle où les femmes n’avaient pas leur place dans la communauté scientifique.
Voici un extrait de son récit : « Une simple pente sablée nous conduit dans la salle de l’Obélisque, où nous restons frappés d’admiration devant le spectacle imposant qui s’offre à nos regards. Au milieu d’une belle voûte de plus de 20 mètres d’élévation, à laquelle une multitude de draperies de stalactites, scintillants sous les lumières, forment une riche ornementation, s’élève une mince colonne cylindrique, l’Obélisque… »
Joseph était visionnaire et avait emporté sous terre ses appareils de mesures pour dresser la topographie de la grotte et son appareil photo immortalisant ainsi la grande obélisque.
C’est à partir de ce cliché que nous est venu l’idée de le reproduire, 132 ans après aidé par Philippe Crochet et Annie Giraud. C’est Fred qui pris la pose identique à celle de Randon, croisant ainsi nos deux mondes : celui des premières photographies souterraines et celui de l’aire numérique…
Grace à Marie France Lapeyrie et à Bernard Derrieu nous avons pu nous procurer auprès de Martine Vallot (petite fille de Joseph et Gabrielle) quelques clichés inédits, notamment de la grotte de Gériols. On y voit Gabrielle posant fièrement au bord du « Grand Lac ». On distingue les lanternes à bougies seul éclairage de l’époque, bien loin de nos Leds HD actuelles…
Lodève, il y a 132 ans était déjà au centre de l’histoire de la spéléologie, de la recherche et de la compréhension du monde souterrain… et Gabrielle Vallot surement une des premières femme spéléologue…
Remerciements : Martine Vallot, Marie France Lapeyrie, Bernard Derrieu, Daniel André, Patrick Durepaire, Philippe Crochet, Annie Giraud, Lambert Soulier, Julien Carette (ONF).
2 réflexions sur « Abîmes du Mas de Rouquet : Sur les traçes de Gabrielle et Joseph Vallot… »
Belle publication Jano et rappel sur l’implication de Gabrielle Vallot, sans oublier les collègues présent à différents titre dans la réalisation de ce travail de mémoire.
Belle évocation d’un passé oublié.
De l’obscurité des cavernes à la lumière généreuse des cimes, il n’a qu’un pas, que plusieurs générations suivantes ont allègrement franchi.
Bravo pour cette initiative qui fait sortir de l’ombre la part féminine, bien trop souvent reléguée aux oubliettes…