Journée Mondiale des Blaireaux : une nouvelle cavité qui rassemble les spéléologues héraultais.
« Celui qui trouve sans chercher, c’est celui qui a longtemps cherché sans trouver »
Le blaireau est un animal méconnu, discret et souvent dénigré par les humains qui voient en lui un nuisible qui ne mérite que traque et chasse cruelle. Son pelage blanc et noir pourtant attrayant se fait de plus en plus discret dans les campagnes du Larzac et il ne bénéficie pas de protection particulière de la part des grandes instances ou des directives habitats. Il n’existe pas de charte de protection du blaireau et encore moins de subventions nationales et européennes pour que les grandes firmes de protection de la nature se penchent sur son cas. Surnommé « le petit ours des campagnes », ce grand mustélidé a des mœurs noctambules et vit la majorité du temps sous terre en essayant d’éviter tant bien que mal les collisions routières… De plus, le mot « blaireau » est devenu dans le langage commun une forme de moquerie qui entache encore un peu plus l’image de cet animal. Cependant et malgré tout, aujourd’hui, 15 mai 2024, c’est la journée mondiale des Blaireaux lancée par l’ASPAS (Association de Protection des Animaux Sauvages) qui dénonce les pratiques cruelles de sa chasse et tente de faire connaitre un peu mieux cet animal aux yeux du grand public. Une belle initiative que nous soutenons bien entendu ! Mais venons en aux faits et aux liens qui nous rapprochent de cet animal hors du commun.
Vous avez dit « sous terre » ? Voilà ce qui nous relie aux blaireaux ; nous aussi nous vivons sous terre ! Loin de là l’idée de croire que nous comparons certains de nos semblables à des blaireaux (dans le sens péjoratif du terme) même si certains le méritent amplement. Cela serait mal nous connaitre de croire que dans ces pages virtuelles nous nous permettons certaines moqueries en transformant ce site en « Blaireau Enchainé » de la spéléologie. A l’image de l’opération Banquier, nous sommes avant tout pour le partage de la connaissance et le rassemblement des spéléologues loin des clivages ancestraux des clubs surtout quand il s’agit d’une nouvelle cavité.
Une découverte un peu particulière…
Il y a quelques années dans la haute vallée de la Vis, un blaireau se promenait tranquillement à la recherche d’un nouveau terrier ou loger sa future blairelle et fonder une famille. Vivant en osmose avec les chevaux camarguais qui peuplent ces contrées, le blaireau découvre un petit trou au milieu d’un sentier. Après quelques coups de griffes discrets, notre blaireau perçoit un léger courant d’air aspirant et décide d’agrandir légèrement le trou afin de s’y faufiler. Et là, c’est le drame ! Le blaireau glisse, tombe, rebondit et s’enfonce à la verticale dans les entrailles du Larzac. Dix mètres plus bas, sonné, il trouve rapidement une suite espérant revoir la lumière du jour en suivant le courant d’air. Il s’engage dans un méandre étroit et progresse de quatre mètres supplémentaires mais sentant le vide juste sous ses pattes, il décide de stopper là son histoire et de se laisser mourir de désespoir. Issue triste et fatale. Nous lui rendons ici hommage en lui attribuant à lui seul la découverte de l’aven du Blaireau à Cheval et en donnant son nom à la cavité. Aucun autre blaireau de quelque sorte que ce soit ne pourra se déclarer « inventeur » à sa place en lui volant la vedette ! Repose en paix petit blaireau ta mémoire sera gravée à jamais dans le calcaire du Larzac !
Il faudra attendre quelques années pour qu’un autre blaireau (bipède celui là!) repère le terrier un jour de février 2024 en allant se promener innocemment dans ce secteur. Intrigué par une drôle de grille en métal posée dessus (surement par des chasseurs prudents, par des semblables usant du droit disparu de « prise de date » ou par des Elohims), le blaireau bipède met à son tour le nez dans le petit trou. Hormis la grille métallique, il ne constate pas de présence humaine ou extraterrestre mais seulement les griffes d’un de ses congénère animal et comprend immédiatement le drame qui s’est joué là quelques années auparavant.
Bien décidé à en découdre, le blaireau bipède lance un « Couic » général (cri généralement utilisé par les blaireautins dans un contexte de frustration ou d’anxiété extrême) et rameute un équipe de blaireaux bipèdes pour tenter de voir ce qu’il y a au fond du terrier tout en ayant préalablement informé le propriétaire des lieux (cf. charte de la FFS). Des blaireaux de toutes sortes répondent à l’appel, venant de nombreux clubs de spéléologie et associations du département. L’aven du Blaireau à Cheval rassemble des bipèdes du G.S.Languedoc (Le Caylar), du G.E.R.S.A.M (Montpellier), du G.S.Montpeyroux, de Larzac Explo, des individuels et aussi des blaireaux universitaires (U.Montpellier). Même l’âme de certains clubs disparus comme le MASC ou encore le S.C.Cournonterral plane au dessus de cette joyeuse ambiance ! Un aven rassembleur on vous dit !
Profondeur atteinte : -90 m !
Il aura fallu seize séances de désobstructions intenses dans l’Oxfordien et un hommage national à notre ami « le blaireau inventeur » pour s’enfoncer encore plus bas que le terminus qu’il avait découvert lors de sa chute fatale. Après le franchissement du puits d’entrée Tamalou (10m), du ressaut de la Bâche (4m), du puits des Zoéforées (7m), place au puits du Grand Faît Mûr (8m) qui nécessite un sang froid sans faille et dans la faille… Au delà, c’est le Bathonien, ses grands volumes et sa boue collante… Le puits suivant (25m) donne accès à un grande faille de belles dimensions (30x5m) qui permet d’explorer un peu plus de 300 ml de galeries infâmes et boueuses ainsi qu’un réseau parallèle tout aussi glamour (réseau de la Belette). Ce volume situé à -50m, collecte l’eau de surface et fait de l’aven du Blaireau à Cheval une perte majeure de cette partie de la vallée . L’aventure continue par le franchissement de deux puits supplémentaires et du « passage chirurgical » pour atteindre la profondeur de -77m sous la surface. Là, une autre partie boueuse et humide bloque l’équipe des joyeux blaireaux à la profondeur approximative de -90m (topographie en cours). Nous cherchons toujours une suite et surtout le courant d’air…
Dans le jargon spéléologique, c’est ce que l’on appelle une opération flash-éclair ! Découvert en février, gratouillé en mars, exploré en avril, publié en mai… Action-Réaction ! Nous ne sommes pas du style à laisser une cavité en attente pendant un an ! L’envie d’explorer et de comprendre le fonctionnement du karst caussenard est trop forte ! De plus, l’Observatoire du Karst en Lodévois et Larzac agrandi son territoire pour cette année 2024 prenant dans son sillage les communes des Rives, du Caylar, du Cros et de Sorbs (34). Se profile à l’horizon des grands projets comme les traçages communs de l’aven du Mas de la Pose (ou des Rouquets) et de l’aven de Coucoureigne situés tous deux sur la commune de Sorbs. Ces deux avens majeurs sont sûrement en relation avec la Foux de la Vis et la source du Théron. L’avenir nous le dira…
A ce titre, l’aven du Blaireau à Cheval semble être lui aussi en connexion supposée avec le bassin versant de la Foux de la Vis. Le travail effectué depuis la découverte n’est donc pas un hasard. Il s’inscrit dans la droite ligne des objectifs fixés par la Communauté de Communes Lodévois et Larzac qui nous fait confiance depuis presque quatre ans. Grâce à ce partenariat, nous levons les interrogations les unes après les autres avec pour unique ligne de mire : l’eau, le partage et la connaissance.
La morale de cette histoire en reprenant les mots de Georges Louis Leclerc c’est que « le Blaireau à plus de facilité que les autres pour jeter derrière lui les déblais de son excavation. » Ensemble protégeons les Blaireaux !
NDLR : Cet article est une syllepse à prendre au premier au second ou au troisième degrés suivant l’humeur du jour et la culture générale de chacun. Toute ressemblance avec des personnes réelles en mal d’aventure ou des animaux vivants n’est que pur hasard et ne relève en aucun cas d’un esprit mal sain ou sarcastique.
De plus la cavité s’ouvre sur une propriété privée et son accès est règlementé.